sigurd

Dans Rheingold, l'assistant et figurant Patric Seibert joue le rôle d'employé du Golden Motel, omniprésent d'une scène à l'autre, tantôt homme à tout faire, tantôt barman ou paparazzi… À l'occasion d'une rotation de plateau, on le découvre dans cet intérieur de boutique tapissé d'affiches de films de Série Z, plongé dans la lecture d'une revue de bandes dessinées des années 1950 : Sigurd. L'image ne dure que quelques secondes mais voilà ce détail fugitif qui s'imprime bientôt dans notre mémoire déjà bien sollicitée. Sigurd renvoie une partie du public aux publications de cette après-guerre marquée par l'influence américaine dans la culture populaire allemande. Créée par le dessinateur suisse Hansrudi Wäscher, la série des Sigurd affiche toutes les caractéristiques du héros au grand cœur. Cette publication s'inscrit dans la lignée des Tarzan, Mandrake, Flash Gordon ou le fameux Prince Valiant apparu dès 1937 sous la plume de l'américain Harold Foster. Editée en petit format, la série atteignit entre 1953 et 1963 le tirage record de 581 albums. La blonde chevelure et l'admirable mèche rebelle de Sigurd auront tôt fait de gagner le cœur et l'imagination de générations de gamins allemands, dont visiblement un certain Frank Castorf

Peu de risque par conséquent d'aller rechercher une quelconque référence au Sigurd d'Ernest Reyer, opéra en quatre actes, neuf tableaux et deux ballets créé en 1867…Et pourtant… L'allusion à la Chanson des Nibelungen et aux textes anciens (Eddas) est en revanche bien présente, il suffira – comme souvent chez Castorf – de dérouler le fil et suivre les pistes, fausses ou vraies. L'un d'entre elles nous conduira à ce Sigurd Œil-de-Serpent (en vieux-norrois : Sigurðr ormr í auga), présent dans les sagas en prose qui furent compilées au XIIe Siècle, particulièrement l'Edda poétique et la Völsunga saga. Ce Sigurd-Siegfried réapparaîtra dans la version germanique médiévale de la Chanson des Nibelungen. Nul besoin de se perdre dans les méandres gutturaux des Fáfnir, Hreidmarr, Sigmundr, Völsungr, Sigrún, Brynhildr, Guðrún, Gunnarr et Högni… il suffira de saisir ce héros germanique entre bulles et vignettes de BD comme un clin d'œil de Castorf en forme d'héroïque fantaisie…Une manière de dire qu’on ne s’éloigne jamais du sujet, et que le Ring est partout, même en BD .

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