Alberic Magnard (1865–1914)
Guercœur (1931)
Tragédie lyrique en trois actes d'Albéric Magnard.
Livret du compositeur.
Créée le 23 avril 1931 à l'Opéra de Paris.

Direction musicale : Ingo Metzmacher
Mise en scène : Christof Loy
Décors : Johannes Leiacker
Costumes : Ursula Renzenbrink
Lumières : Olaf Winter

Stéphane Degout (Guercœur)
Catherine Hunold (Vérité)
Antoinette Dennefeld (Giselle)
Julien Henric (Heurtal)
Eugénie Joneau (Bonté)
Gabrielle Philiponet (Beauté)
Adriana Bignagni Lesca (Souffrance)
Marie Lenormand (L'Ombre d'une femme)
Alysia Hanshaw (L'Ombre d'une vierge)
Glen Cunningham (L'Ombre d'un poète)

Chœur de l'Opéra national du Rhin
Chef de chœur : Hendrik Haas

Orchestre Philharmonique de Strasbourg

Strasbourg, Opéra National du Rhin, le dimanche 28 avril 2024 à 15h

Chef‑d'œuvre mythique représenté une seule fois en France en 1931 à l'Opéra de Paris, Guercœur d'Alberic Magnard revoit le jour sur la scène de l'Opéra du Rhin, dans une mise en scène efficace de Christof Loy et sous la direction engagée et ardente de Ingo Metzmacher. On doit à la persévérance et la bonne intuition d'Alain Perroux, le directeur des lieux, une résurrection de ce qu'il faut bien qualifier d'événement lyrique de cette saison 2023–2024 avec un Stéphane Degout superlatif dans le rôle-titre et un plateau vocal de tout premier plan.

Stéphane Degout (Guercœur), Adriana Bignagni Lesca (Souffrance)

Le retour des morts parmi les vivants n'est jamais une aventure de tout repos. Et généralement, les malheurs enchaînent avec les déceptions comme le démontrent la mythologie et la littérature qui regorgent de ces récits où la proximité de la mort est toujours l'occasion d'une leçon morale. Que ce soit le colonel Chabert, "mort à Eylau", ou bien Orphée, sans doute le plus célèbre parmi ces morts-vivants partis explorer les Enfers, c'est toujours sur le chemin du retour qu'apparaissent les problèmes. On citera également le message qu'adressent les trois Parques à Thésée dans Hippolyte et Aricie de Rameau :

Quelle soudaine horreur ton destin nous inspire ?
Où cours tu malheureux ? Tremble ; frémis d'effroi.
Tu sors de l'infernal Empire,
Pour trouver les Enfers chez toi.

Cet avertissement résonne étrangement avec le destin de Guercœur, héros de cette "tragédie en musique" sur une partition et un livret d'Alberic Magnard (1865–1914). Le destin du personnage se confond avec l'incompréhensible purgatoire dans laquelle cette œuvre dormait depuis 1931 et une unique représentation à l'Opéra de Paris dans sa version intégrale. La personnalité complexe et le sort fatal du compositeur jettent assurément un jour particulier sur ce chef d'œuvre élevé au rang de mythe lyrique par une réputation qui contraste avec sa rareté sur les scènes d'opéra.

Il n'est pas peu dire que l'initiative d'Alain Perroux, directeur de l'Opéra National du Rhin, vient combler un manque pour ces générations de spectateurs ayant découvert la musique de Magnard à travers les traces discographiques qu'elle a pu inspirer à quelques éditeurs. On parlera ici du fameux enregistrement intégral de Guercœur et des pièces symphoniques par Michel Plasson avec le Capitole de Toulouse avec José van Dam dans le rôle-titre dans les années 1980, l'anthologie de sa musique de chambre chez Accent ou bien les versions isolées du célèbre quatuor : Via Nova (Erato), Artis (Accent), Ysaÿe (Aeon) et Béla (le Palais des dégustateurs). Absent des scènes à l'exception d'une modeste production donnée au Theater Osnabrück en 2019, Guercœur n'avait été enregistré que dans une version incomplète par Tony Aubin à la tête de l'Orchestre de l'ORTF en 1951. Troisième production dans l'histoire de l'œuvre, la mise en scène de Christof Loy a tout d'une résurrection qu'il faut bien qualifier d'événement lyrique de cette saison 2023–2024 de l'Opéra National du Rhin.

Stéphane Degout (Guercœur), Antoinette Dennefeld (Giselle)

La rigueur visuelle de cette scénographie dessinée au cordeau sur le plateau strasbourgeois n'est pas si éloignée de l'ascèse morale d'un Alberic Magnard, lui-même artiste inclassable épris de liberté. Se tenant à bonne distance des cercles parisiens à la mode, il s'attacha à creuser avec une intransigeance folle un sillon musical où se lit conjointement l'immense respect pour Wagner et la vigueur souveraine d'une musique française attachée à la pureté des formes.

Magnard n'est jamais là où on l'attend et il n'est surtout pas là où d'autres ont déjà été. Sa musique et sa destinée personnelle se mêlent avec une exactitude assez curieuse qui font de lui un cas tout à fait unique dans l'histoire des arts. Appartenant à la catégorie dite des "compositeurs engagés", il fit mentir un destin qui semblait tout tracé par une fortune familiale du côté d'un père directeur du Figaro. Alberic Magnard fut de tous les combats sociaux de son temps, et parmi les plus exigeants, au point qu'un un bon nombre d'entre eux peuvent nous sembler aujourd'hui réellement visionnaires, comme ce fut le cas pour sa Quatrième Symphonie qu'il destinait à l'Union des Femmes Professeurs et Compositeurs de Musique (UFPCM), une association féministe fondée en 1904 et qui avait déjà donné l'Hymne à la justice. Ardent dreyfusard et faisant éditer ses partitions dans une imprimerie marxiste, il prit la plume le jour même où Zola fit paraître son J'accuse ! pour lui adresser un soutien inconditionnel avec en conclusion, ce qui résonne aujourd'hui comme une étrange prémonition : "Marchez ! Vous n'êtes pas seul. On se fera tuer au besoin".

Aux premiers jours de l'offensive allemande de 1914, une brigade de uhlans fit irruption dans son manoir de Baron (Oise) où il vivait retiré et entouré de partitions et d'œuvres d'art. Il n'hésita pas à tirer et tuer des assaillants. Cet épisode fit beaucoup pour sa postérité au point qu'on résume souvent le compositeur avec cet épilogue héroïque largement relayé par la propagande de l'époque. Parmi les partitions qui disparurent dans les flammes ce jour-là figurent les actes 1 et 3 de Guercœur dont il existait heureusement une version piano-chant qui permit au fidèle Guy Ropartz de reconstituer complètement l'orchestration.

Le livret écrit par le compositeur puise dans une philosophie éclairée, au mitan d'un spiritualisme de surface et de valeurs républicaines bel et bien incarnées malgré la présence d'allégories aux noms évocateurs de Bonté, Vérité, Beauté, Souffrance… Au lever de rideau, Guercœur est ce héros décédé errant parmi les ombres dans des limbes où domine la voix de la Vérité. Parvenant à convaincre cette divinité de retourner sur Terre pour retrouver son épouse Giselle et y parachever une mission politique qu'il juge essentielle. Hélas ! L'aventure tourne court en découvrant que Giselle est désormais mariée à Heurtal, l'ancien ami de Guercœur qui règne désormais en tyran sur une population tournant le dos aux idéaux démocratiques. Le dernier acte voit le retour du héros parmi un empyrée où il est accueilli par un chant plein d'espoir qui vante l'alliance de la science et de la religion pour un futur bonheur de l'humanité.

Antoinette Dennefeld (Giselle), Julien Henric (Heurtal)

La mise en scène de Christof Loy ne surcharge pas visuellement le message et l'idéologie du livret, empruntant à une austérité des décors un cadre expressif efficace. Le recours à une alternance entre espace nocturne et lumineux renvoie à une lecture qui reprend le schéma eschatologique en l'appliquant à la thématique républicaine du triomphe de la vérité sur l'orgueil. "Le temps n'est plus, l'espace n'est plus. Gloire à la Vérité qui nous délivra de la forme et de l'esprit !" chante le chœur au lever de rideau. Rien de moins parsifalien en somme avec ce souvenir du Zum Raum wird hier die Zeit (Ici, le temps devient espace) que Magnard renvoie explicitement à la notion de substantialisme, comme le précise très justement Dom Angelico Surchamp (le fameux spécialiste de l'art roman) dans les notes accompagnant l'enregistrement EMI. L'empyrée auquel Magnard fait allusion dans les deux actes extrêmes de Guercœur est un curieux mélange d'allégories républicaines et la théorie platonicienne d'une Vérité dominant la traditionnelle opposition entre le matérialisme et le spiritualisme. Ni corps ni âme, donc. Pour filer la métaphore wagnérienne, on pourrait dire aussi que Guercœur est un Tannhäuser inversé – fuyant la Vérité dans un Vénusberg sans érotisme ni chair pour se perdre dans l'illusion et la déception d'une aventure terrestre. Mort au premier acte, il meurt une seconde fois au troisième.

La référence platonicienne se retrouve dans le mythe d'Er, un personnage que décrit Socrate dans un dialogue de "La République". Er est ce guerrier mort au combat qui revient à la vie pour raconter son expérience post-mortem. Il prétend avoir été transporté dans l'au-delà où il a observé le jugement des âmes et le cycle de récompenses et de punitions. Ce récit mythique de l'au-delà offre des réflexions philosophiques sur la justice, la moralité et la vie après la mort. Une source incertaine cite la mention qu'aurait fait Francis Magnard à son fils concernant Bossuet et l'oraison funèbre de Michel le Tellier :

"Ah ! si quelques générations, que dis-je ? si quelques années après votre mort vous reveniez, hommes oubliés, au milieu du monde, vous vous hâteriez de rentrer dans vos tombeaux pour ne voir pas votre nom terni, votre mémoire abolie et votre prévoyance trompée dans vos amis, dans vos créatures et plus encore dans vos héritiers et dans vos enfants."

Bossuet utilise à plusieurs reprises le procédé invitant à penser à un retour des défunts parmi les vivants pour mieux souligner la dimension morale du sermon et la crainte d'une vengeance post-mortem invitant l'auditoire à mieux se comporter (Oraison funèbre de la Grande Mademoiselle, le sermon sur la Mort…). C'est dans un ensemble très large d'inspirations que Magnard puise pour un opéra dûment qualifié de "tragédie en musique", à ne pas confondre avec une classique "tragédie lyrique". Cette tragédie est celle des idéaux et des problématiques parfaitement ancrées dans cette articulation entre XIXe et XXe siècle – problématiques qui percent très lisiblement sous la fine surface qu'on pourrait à tort assimiler à un drame romantique. D'où cet aréopage de divinités dont le jeu consiste à dégager une leçon de vie pour le héros mort retournant à la vie et revenant à la mort – en un sens, un voyage "dantesque" dont l'inversion traduit la confusion des Paradis et Enfer.

Pour autant, il n'y a point ici de démarche symboliste à la Maeterlinck dans la façon de nommer ces allégories. Beauté, bonté, souffrance… les personnages-idées sont donnés à voir dans une parfaite lisibilité qui ne craint pas une certaine forme de naïveté. On retrouve cette simplicité et cette épure dans une mise en scène de Christof Loy qui traduit une dimension invariablement liée au Purgatoire, cet espace créé tardivement par la tradition catholique où séjournent des âmes ni heureuses ni malheureuses attendant d'être orientées vers la bonne destination. Impossible en effet de différencier par le simple jeu des oppositions de couleurs si l'on se trouve au Ciel ou sur la Terre, au Paradis ou en Enfer. Les savants et subtils éclairages de Olaf Winter alternent entre lumière zénithale et rayons obliques, découpant sur fond sombre des ombres errantes à l'allure de voyageurs perdus dans un vaste espace de transit. On retrouve les mêmes figurants et choristes sans pouvoir discerner clairement entre les âmes désincarnées et ce peuple en chair et en os. Le statisme des deux actes "célestes" contraste avec un deuxième acte où seuls les ensembles bénéficient d'une direction d'acteurs soulignant la véhémence des groupes s'affrontant autour de Heurtal. Guercœur semble perdu entre un Paradis où règnent les ténèbres (Vérité semble porter le deuil d'une humanité qui la fuit) et une Terre que les faux-semblants et les illusions concourent à rendre… infernale.

Loy montre la série des gestes rituels d'une cérémonie au cours de laquelle Guercœur quitte sa nature incorruptible pour retrouver son corps. "Ta présence souille ces lieux" lui dit Vérité à l'issue d'une sorte de toilette mortuaire où Souffrance lave son corps et lui dépose sur les yeux le bandeau noir qu'on utilise dans certains rites pour dissimuler les yeux du défunt dans son cercueil. Christof Loy reprend par ailleurs des codes visuels qu'on dirait empruntés aux Boréades de Robert Carsen avec ces tenues chics et colorées (Ursula Renzenbrink) façon cocktail mondain ou scène de film des années 1950. Le chœur répand sur le sol des fleurs formant les mêmes touches multicolores que dans la Bactriane où régnait la reine Alphise, héroïne de la tragédie de Rameau. L'allusion fait ici référence aux Champs-Élysées que parcourent les âmes des défunts ainsi qu'au ballet des ombres heureuses dans Orphée et Eurydice de Gluck. Ces ombres qui précèdent l'entrée d'Orphée au royaume des morts (ici : Guercœur retrouvant le royaume des vivants), on le retrouve dans l'unique coupure du livret au tout début de l'acte 2 quand Guercœur est trompé par le chœur des illusions d'amour et des illusions de gloire.

Stéphane Degout (Guercœur), Gabrielle Philiponet (Beauté)

La coupure donne à l'interlude symphonique un rôle dramaturgique qui semble dialoguer avec l'unique allusion picturale de ce décor rotatif : une immense reproduction du Paysage avec figures de danse (1669) de Claude Gellée dit "Le Lorrain". La peinture baroque est donnée à voir sur deux pans qui forment un curieux espace replié et formant un angle aigu. Une figurante féminine est montrée de dos, tournée vers cette pliure comme une impasse, tandis que Guercoeur est allongé au premier plan comme pour préfigurer la séparation avec Giselle dans la scène suivante.

L'interlude symphonique et la parenthèse bucolique précède cette scène qui est celle du pardon de Guercœur, axe musical et thématique de l'œuvre toute entière. Giselle pousse un cri au moment où elle revoit celui qui était son mari et à qui elle doit à présent avouer son parjure. Loy mêle des éléments relatifs à la fois à une scène rêvée et très réaliste. Giselle reconnaît Guercœur, ce qui n'est pas le cas de Heurtal qui voit dans son apparition un stratagème de ses ennemis. Elle implore son pardon, l'appelle "Maître"… et prend la main de Guercœur pour la poser sur son ventre pour suggérer qu'elle est déjà enceinte de Heurtal ("Condamne l'amante ! Prends pitié de la mère ! Songe aux enfants qui naîtront de mon corps ! Songe à mes fils !"). Dans le III, la seconde mort et le retour de Guercœur manquent d'idées fortes qui auraient pu donner plus de force au final et ce quatuor féminin entourant la dépouille du héros ("que ton âme se perde dans l'âme des choses"), avec ce couple de figurants à son chevet, comme une représentation du couple idéal qui répond à l'ultime exhorte du chœur : "Espoir !"

Stéphane Degout (Guercœur), Julien Henric (Heurtal)

Le plateau vocal est à la hauteur de l'événement, avec un Stéphane Degout qui fédère à lui seul tous les superlatifs. Le baryton français fait revivre les souvenirs de ses récents Hamlet et Wozzeck pour traduire à la fois l'ampleur psychologique mais aussi les failles et la souffrance rentrée de son personnage. D'autres souvenirs renvoient à la signature discographique de José van Dam dans l'enregistrement de Michel Plasson, imposant – peut-être plus encore que son illustre aîné limité par la présence des micros – un registre grave où l'airain se marie avec une transparence remarquable du phrasé.  Julien Henric offre à Heurtal une vivacité de projection et une clarté de timbre très juvénile que ne parviennent pas à ternir les quelques voyelles ouvertes qui percent régulièrement dans les moments de tension dans la proximité de l'aigu. Le rôle de Giselle est admirablement tenu par une Antoinette Dennefeld dont chaque apparition semble un bonheur d'écoute supplémentaire et la confirmation d'une grande personnalité lyrique. La façon dont elle passe de la frayeur de l'aveu du parjure à la demande du pardon signe une interprète de tout premier plan. Seule Catherine Hunold (Vérité) peine à s'élever au III quand la direction d'acteur l'abandonne sans éclat parmi le magnifique mais trop statique quatuor des voix féminines qui entourent Guercœur au moment de sa seconde mort. Adriana Bignagni Lesca (Souffrance) compose vocalement un personnage ambigu de démon et ange gardien. Le timbre très enveloppant et la belle projection de Eugénie Joneau donne à Bonté une ampleur étonnante quand Gabrielle Philiponet semble un peu trop mesurée de phrasé et de ligne dans le rôle de Beauté.

Le geste fort et clair de Ingo Metzmacher soulève un Orchestre Philharmonique de Strasbourg capable de toutes les transparences et d'une tendresse qui dessine un écrin de timbres très contrastés dans une œuvre où l'inspiration germanique ne cède en rien à l'esprit et à la couleur française. Puissant dans la carrure et l'assise des nuances dynamiques, sa lecture ouvre sur de larges perspectives mélodiques où le son devient élément pictural à part entière et soutient le chant avec une intensité qui jamais ne vient couvrir le chant. Ardente autant que transparente, cette interprétation puise dans des références expressives moins fin de siècle que réellement postromantique et regardant vers une modernité qui donne enfin à Alberic Magnard la place qui lui revient parmi les références musicales de l'histoire de la musique. La soirée mérite assurément un qualificatif de "référence" qui ne sera en aucun cas galvaudé. On se réjouit à l'avance de pouvoir profiter prochainement de la diffusion du spectacle sur Arte Concert, en attendant les productions annoncées de David Hermann à Francfort et Olivier Py à Dortmund…

Stéphane Degout (Guercœur), Catherine Hunold (Vérité), Eugénie Joneau (Bonté), Gabrielle Philiponet (Beauté)
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David Verdier
David Verdier Diplômé en musicologie et lettres modernes à l'université de Provence, il vit et enseigne à Paris. Collabore à plusieurs revues dont les Cahiers Critiques de Poésie et la revue Europe où il étudie le lien entre littérature et musique contemporaine. Rédacteur auprès de Scènes magazine Genève et Dissonance (Bâle), il fait partie des co-fondateurs du site wanderersite.com, consacré à l'actualité musicale et lyrique, ainsi qu'au théâtre et les arts de la scène.

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