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    Édito Hiver 2023

    Rébellion-extinction  

    La Rédaction — 4 février 2023

    Pour l'Opéra de Rouen, le couperet vient de tomber : 6 semaines de fermeture obligatoires pour "préserver au mieux l'activité de la rentrée 2023–2024". Les "acrobaties comptables" dont parlait Jean-Baptiste Jacob, administrateur général de l'opéra de Rouen, n'auront donc pas suffi pour atteindre les équilibres budgétaires nécessaires à un maintien de l'ensemble de la programmation pour la prochaine saison 2023–24. Un peu plus tôt, c'est à Strasbourg qu'on annonçait des suppressions et, là aussi, pour des raisons similaires : "augmentations importantes et non prévisibles de ses charges (hausse des salaires de la fonction publique territoriale, hausse du prix des matières premières et de l'énergie) ainsi la baisse de dotation de certains de ses partenaires publics confrontés aux mêmes difficultés". La liste s'allonge… on vient d’apprendre que l’Opéra de Montpellier était lui aussi contraint de réduire sa saison.

    Fermez le ban ? Pas si sûr. Nous n'en sommes peut-être qu'aux prémices d'une longue série de perturbations qui pourraient, à brève échéance, déstabiliser l'ensemble de l'édifice lyrique français. Certains se sont autorisés à chercher des solutions aux différentes crises, à commencer par la crise de l'énergie et des matières premières. Il existe en Europe un Opéra zéro émissions, celui de Göteborg en Suède, depuis plusieurs années et qui a récemment produit un Ring entier avec cette contrainte. Et en France ? "Plus on travaille, plus on émet de carbone" lançait l'inénarrable Sandrine Rousseau début janvier. Il aura pourtant fallu pas mal de cogitation et des heures de brainstorming pour mettre sur pied le concept de l'écoconception des décors d'opéra, nouvelle marotte lancée fin 2022 par le Collectif 17h25.

    Derrière ce nom mystérieux indiquant l'heure à laquelle un accord a été conclu, il y a le Théâtre du Châtelet, le Festival d'Aix-en-Provence, l'Opéra de Paris, l'Opéra de Lyon et le Théâtre Royal de la Monnaie – cinq institutions qui ont choisi de se réunir pour standardiser la construction des décors. Détaillé par Claire Hebert, directrice générale adjointe de l'Opéra de Lyon, il s'agit de "réfléchir aux éléments invisibles, aux structures d’un décor, tel qu’un escalier, un châssis, une fenêtre, et d'essayer de trouver un socle commun pour ces éléments. Ce socle commun d'éléments standards doit pouvoir ensuite être réutilisé par chaque maison, et leur permettre de voyager plus léger quand nous seront en co-production. Puisqu’il y aura sur place les mêmes éléments standardisés". Sans mentionner évidemment que les coproductions ne sont pas systématiques et que le plus souvent les productions ne sont jamais reprises, culte de la nouveauté oblige…

    Le Collectif 17h25 précise que ces normes interviendront "sans restreindre la force créatrice qui fait la richesse de chacune de ces institutions". Rassurons donc les lecteurs de Wanderer : les lavabos de Krzysztof Warlikowski et les tournettes d'Aleksandar Denić devraient échapper à ces mesures de haut vol… En revanche, les spectateurs de l'Opéra de Bordeaux devront définitivement dire adieu aux productions fastueuses et dispendieuses. Adieu veaux, vaches cochons, couvée ! Voici venu le règne du "zéro achat" avec comme produit de lancement, un Requiem de Mozart mis en scène de Stéphane Braunschweig qui joint le moche au recyclable en donnant une seconde vie à des matériaux qui constituent le décor. La méthode est simple : il faut désormais glaner dans les réserves l'ensemble des éléments qui constitueront à l'arrivée le décor du spectacle. "Le but, ce n'est pas de donner une contrainte, c'est que nos ressources servent de berceau à la créativité" déclare sans langue de bois (recyclé) Emmanuel Hondré, le directeur des lieux, concédant in fine à la journaliste du Point que "la grande difficulté, c'est le travail ensuite au quotidien des ateliers. C'est-à-dire que, à aucune des étapes, on ne doit acheter du tissu, du bois, du fil, de la peinture, de la mousse, etc. Tous ces petits achats doivent être soit l'objet d'une réutilisation, soit un don d'un partenaire, soit être issus d'une ressourcerie, soit faire partie d'un troc".

    S'il est facile de réaliser l'enfer quotidien que peut représenter une telle initiative pour les équipes techniques de l'Opéra de Bordeaux, on restera plus circonspect quand, dans la même interview, Emmanuel Hondré annonce qu’on peut être "zéro achat" mais quand même déficitaire". Le prix du casting vocal et des frais d'exploitation feront toujours monter la température et la note finale car, oui, l'opéra coûte cher.

    Le lecteur de Wanderer devra-t-il bientôt protester en imitant les militants du collectif "Dernière rénovation" venus l'automne dernier à l'Opéra Bastille perturber la représentation de la Flûte enchantée en s'enchaînant au décor ? L'admirateur des gigantesques structures de Zeffirelli, Castellucci, Peduzzi, Piano ou autres pourra reprendre à son compte l'intégralité du communiqué de "Dernière rénovation" expliquant vouloir "dire aux gens qu'on peut encore éviter le pire, qu'on peut peut-être encore sauvegarder un monde où la culture existe et dans lequel on ne serait pas obligé de se battre pour sa survie".

    L’opéra coûte cher, et il est facile à tout politique d’en pointer les dépenses quand le lyrique engloutit les subventions culturelles d’une ville au bénéfice d’un maigre pourcentage de la population locale. On pointe l’élitisme, la non accessibilité à tous et le tour populiste est joué. Qui ira verser une larme, sur un genre culturel de niche qui plus est complexe (ce qui aujourd’hui est un crime), et réservé à un public restreint ? S’attaquer à l’opéra est soi-disant vertueux et peut payer politiquement auprès d’un électorat non concerné au prix d’arguments faciles : vu les annonces évoquées plus haut, il s’agit de fermer les maisons de plaisir, selon un célèbre essai de Bernard Bovier-Lapierre publié en 1991 – l’affaire n’est pas neuve, ou changer de système, autre antienne.

    On parle en effet de retour aux troupes sur le modèle allemand.  On oublie de dire que les soirées d’opéra dans la plupart des théâtres allemands de troupes dépassent souvent largement la centaine, quand en France elles de dépassent pas 70 au mieux dans les plus grandes salles et qu’elles tournent le plus souvent autour de 30… Dans une période affectée par une crise du public notable un peu partout, faut-il augmenter les levers de rideau ? Les maintenir à tout le moins car diminuer l’offre conduit inévitablement à l’accentuation de la chute de la fréquentation : la crise Covid l’a montré, mais pas seulement. Là où l’offre diminue, Covid ou non, le public s’en va…

    Enfin, dans tout ce débat très actif, un élément ne semble pas âtre abordé, sans doute par pudeur : la qualité de l’offre, condition préalable au maintien du public.  Le dernier Moïse et Pharaon de Lyon, une municipalité qui n’aime pas son opéra outre-mesure, a fait le plein du public chaque soir. Il doit bien y avoir une raison… Mais il ne faut pas trop le dire, car le but de l’opération semble bien pour certains de faire mourir les opéras au petit feu de la nécrose idéologique.

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