Richard Wagner (1813–1883)
Siegfried (1876)
Der Ring des Nibelungen
Ein Bühnenfestspiel für drei Tage und einen Vorabend
Deuxième journée.
Livret du compositeur
Création au Festival de Bayreuth le 16 août 1876

Direction musicale : Cornelius Meister
Mise en scène : Valentin Schwarz
Décors : Andrea Cozzi
Collaboration aux décors : Stephan Mannteuffel
Costumes : Andy Besuch
Dramaturgie : Konrad Kuhn
Lumières : Reinhard Traub

Siegfried : Andreas Schager
Mime : Arnold Bezuyen
Der Wanderer : Tomasz Konieczny
Alberich : Olafur Sigurdarson
Erda : Okka von der Damerau
Brünnhilde : Daniela Köhler
Fafner : Wilhelm Schwinghammer
Waldvogel : Alexandra Steiner
Hagen jeune : Branko Buchberger
Grane : Igor Schwab

Orchester der Bayreuther Festspiele

Bayreuth, Festspielhaus, samedi 13 août 2022, 16h

Avec Siegfried nous sommes au cœur de l’histoire née de l’imagination wagnérienne sous le nom La mort de Siegfried poème qu’il termina  en 1848 en se rendant vite compte qu’il fallait aussi pour que l’histoire soit claire, raconter tout ce qui précédait. L’idée du Ring était née.
Siegfried, héros central est une sorte de Prométhée germanique, un héros pleinement libre avec lequel d’ailleurs Wagner avait des relations ambiguës, appelant son fils Siegfried, mais ne le traitant pas toujours bien dans son œuvre, notamment dans
Die Götterdämmerung.
Cet enfant né de Wotan et élevé par Mime est un peu bousculé dans son système de valeurs, à condition qu’il en ait un.
La mise en scène de Valentin Schwarz n’en fait pas le héros attendu, à l’instar de la plupart des mises en scène d’aujourd’hui d’ailleurs. Mais
Siegfried est l’épisode où le travail de Valentin Schwarz, toujours irrégulier entre bonnes idées et mauvais développements, atteint cependant une réelle qualité et une grande précision à l’acte II, nous le verrons. 

 

Nous l’avons écrit souvent, Siegfried est sans doute l'opéra le plus ingrat du Ring, ou plutôt celui qui se dérobe le plus au spectateur. Musicalement, Chant de la forge, Murmures de la forêt et chant de l'Oiseau, puis réveil de Brünnhilde constituent des morceaux musicaux de choix, avec un duo final qu'on attendrait explosif et amoureux et qui en réalité est rempli de doutes, de menaces, de craintes, contenant tout entier la catastrophe finale, qui n'a rien du romantisme qu'on évoque parfois.
Siegfried est aussi une pièce d’éducation, où peu à peu le « héros » apprend (peu) qui il est et d’où il vient, mais surtout apprend la peur, qui est signe de notre humanité. Un sentiment que connaît Siegfried au contact de la femme, Brünnhilde, et que parallèlement Brünnhilde développe dans sa première peur, celle de perdre sa virginité, signe de sa nouvelle condition de mortelle.
Dans la vision de Valentin Schwarz, la question de l'éducation est souvent évoquée, et on va le voir, de manière marquée dans Siegfried, mais en plus dans cette production tout le monde est mortel, et les enjeux semblent aussi ailleurs. Dans un cycle tout dédié à la famille et à la transmission, Siegfried est le passage d'une génération à l'autre (mais c’est vrai dans l’histoire conçue par Wagner et pas seulement par Schwarz). « La charge » est portée par les fils et filles, Siegfried bien sûr, mais aussi le jeune Hagen, l'enfant enlevé par Alberich et finalement gardé par Fafner, qu'Alberich et Wotan veulent récupérer et enfin Brünnhilde.
On avait vu combien l'enfant était insupportable dans Rheingold, résultat du contact de Mime et d'Alberich et donc éduqué à la mode Nibelheim, pas très recommandable.
La question de l’éducation bien perçue aussi naguère par Castorf se complexifie dans cette production. Siegfried est bien ici le fils de Wotan, mais il reste celui qui est adopté et élevé par Mime. Certes, le jeune chien fou sent bien qu’entre lui et Mime il y a comme une béance, mais il a passé quand même une vingtaine d’années à ses côtés. Personne ne peut en sortir indemne, y compris si instinctivement le jeune Siegfried nourrit envers Mime une haine tenace.
Siegfried est fils de Wotan, un peu de Mime et beaucoup de la Nature où il a
appris essentiellement tout ce qu'il sait. Un Siegfried à l'état de nature, c'est un Siegfried qui applique la loi de la jungle, celle du plus fort. Brut de décoffrage, en somme comme Castorf et d'autres l'avaient bien vu, pas vraiment un gentil garçon, pur produit des malfrats chics et pas chics qui remplissent la production et ici en plus ivrogne. Par ailleurs, l’éducation ciblée de Mime (on va le voir) ne peut avoir enseigné à Siegfried le bien et le mal : il ignore aussi bien la peur que la loi morale, ça va d’ailleurs peut-être ensemble.

Mime (Arnold Bezuyen) avec une marionnette de Walkyrie, dans son petit théâtre)

Acte I

Trois moments très différents, quelquefois ridicules, quelquefois efficaces, caractérisent le Siegfried signé Valentin Schwarz. Certains metteurs en scène organisent les ruptures entre les opéras du Ring par des décors très différents (Castorf) d'autres réutilisent les espaces en les agençant, le décor dans la production Schwarz est essentiellement le même, pas toujours bien utilisé, et qui en tous cas ne fait jamais rêver, car dans cette production il est interdit de rêver.  Le décor est un des points faibles de la production.
Comme Chéreau, Schwarz choisit d'installer Mime et Siegfried dans l'espace de Hunding réaménagé : il a fait visiblement quelques travaux dans cette habitation soupirail. Cet espace est devenu un espace « chambre d'enfants » obsessionnel. Il n'y a pas que chez les Wotan qu'on gère les chambres d'enfants (élégamment), mais aussi chez les Mime… De manière pathologique.
Pour comprendre cet espace tout entier dédié de manière caricaturale à l'enfant, il faut se replacer dans la « psychologie » de Mime qui a recueilli Siegfried dans un seul but, l'amener à Fafner et à reprendre l'Or qu'il récupérera à son profit. Mime, Alberich, Wotan, même combat.
Seulement Mime n'est pas très intelligent, et un peu excessif, il n'a surtout aucun sens du temps qui passe : Siegfried a une vingtaine d'années et la maison est une maison à jouets ; de fait, et Siegfried lui-même le souligne, l'autre ne lui apprend que peu de choses, alors il-prend ses leçons de la nature, rousseauiste mais pas vraiment naturellement bon .

Mime (Arnold Bezuyen) avec des marionnettes : on reconnaît à gauche le jeune Hagen (Le Ring) avec sa casquette.

Il y a un rideau de plastique transparent avec Happy Birthday, et Mime a sans doute exagéré la fête, il y a un théâtre de marionnettes avec des marionnettes attendant leur tour, comme par hasard celles de l'histoire du Ring, il y a une épée de plastique, des poupées, bref, un attirail hétéroclite qui fait penser que tout est construit pour Siegfried mais aussi pour lui-même, un Mime en quelque sorte en souffrance (sans famille, sans enfants, sans descendance) qui surjoue le papa par frustration de ne pas l'être. Des éléments en effet inutiles souvent puisque jamais Mime ne raconte à Siegfried sa véritable histoire, le laissant dans la brume (« je suis à la fois et ton père et ta mère »).

Mime (Arnold Bezuyen) dans son coin aux tables renversées

Là où l’arbre gisait chez Hunding, il y a des tables renversées, avec dessus pour les couvrir le châle de Freia. Ce châle transite d’opéra en opéra, il en avait vêtu élégamment Freia dans Rheingold : comme la lampe-pyramide, il est un objet qu’on se passe (ou qui passe) et qui signifie la famille, et plutôt les souffrances, il est ensanglanté avec Sieglinde, et naturellement Siegfried  le récupère, ou plutôt Mime avec d’autres oripeaux, dont le manteau de Siegmund que Siegfried porte : tantôt ensanglanté, tantôt non, ce châle a perdu l’élégance qu’il avait dans Rheingold, mais il est trace, il est signe familial, il est fétiche en quelque sorte.
Entre les traces du passé, d’un passé d’ailleurs flou pour les héros nouveaux comme Siegfried et une éducation qui limite ses savoirs au strict nécessaire, évitant justement d’être précis : la question du temps et de la relation des héros au temps se pose dans ce premier acte de Siegfried ; certes Mime connaît le passé et les épreuves qu’il va passer avec le Wanderer ou les questions qui va lui poser le prouvent, mais d’un autre côté, dans ce réduit où triomphe une certaine vision de l’enfance, Mime ne semble pas lui-même avoir beaucoup grandi, en dehors de son obsession, il se dissimule sous les tables renversées, comme ces cabanes que se construisent les enfants et il s’y réfugie pour lire… des bandes dessinées. Invisible de loin, mais une âme charitable placée très près me l’a soufflé. Cela rappelle encore les univers de ces affiches qu’on voyait chez Castorf, et les bandes dessinées sur Sigurd qu’on voyait dans Rheingold alors : Mime ne sort pas de ce type d’univers. Il ne mûrit pas. Il a un rapport au temps guidé par son but, mais en même temps faussé. Rappelons chez Castorf que Mime éduquait Siegfried avec une marée de livres… Mais avec à peu près le même résultat…
Chacun a une idée du temps faussée, ou pas d'idée du tout de ce temps qui passe et qui fait vieillir ou grandir. Siegfried le premier qui sait peu du monde, même s’il a appris que sa mère est morte, Mime ensuite, perdu dans ses mythologies enfantines et une vision déformée d’un Siegfried qu’il refuse de voir grandir autrement que pour aller tuer Fafner, c'est à dire qu'il le façonne comme un héros de Manga ou de bandes dessinées et même s'il lui montre un poster de femmes nues qu'on va revoir plusieurs fois après…
Ainsi la première épée forgée, celle que Siegfried (revêtu du manteau de Siegmund, emporté comme un fétiche par Sieglinde) brise allégrement, est-elle une épée de plastique que Siegfried brise, laissant apparaître une guirlande de LED pendante comme un pénis en panne.
Siegfried, c'est la puissance de la sève montante (on le verra avec l'oiseau et avec Brünnhilde) et Mime ne lui forge que du flasque, l'épée étant évidemment un substitut phallique.
Mime a vieilli,- mais s’en aperçoit-il ?-  il porte une béquille, et Siegfried le brutalise beaucoup, il lui met allégrement la tête dans le micro-ondes, puis dans l’aquarium , il maltraite aussi les marionnettes, les décapite – il ne sait rien d’elles et n’en veut rien savoir . Et Mime a gardé aussi la casquette noire et jaune du petit enfant de l'or du Rhin qui l'avait perdue en étant enlevé par Wotan et Loge et qu'il avait ramassée alors. Tout se mélange, valse d’enfance et de vieillesse, obsessions et rêves, mais ses projets avec Siegfried sont décidément mal partis…
Bientôt Siegfried repart et arrive le Wanderer, avec le jeu de questions et réponses bien connu où l'on pense que les marionnettes qui représentent grosso modo l'essentiel des questions posées par l'un ou l'autre vont servir… Las, le théâtre de marionnettes ne sert qu'à faire apparaître le Wanderer qui s'y glisse (marionnette suprême ? qui a tout perdu ?) pour se faire reconnaître de Mime. L'idée excellente est finalement très peu exploitée hélas, de ce monde du Ring réduit à Guignol. Mais Wotan laisse un cadeau dans une boite, une autre béquille…
Quand Siegfried entame le chant de la forge sans forge, il découvrira dans cette béquille que c'est Notung qui s'y dissimule comme dans une canne-épée. Notung, redevenue épée pour les besoins de la cause, mais qui servira plus ou moins à vide, et qui tournoie sous les mains joyeuses de Siegfried qui joue, sans enclume, à tout casser autour de lui, et avec des sons venus de la fosse et non plus de la scène, comme d'habitude. Un premier acte à la fois riche en idées (souvent bonnes) mais discontinues et pas menées au bout, ce qui rend l'ensemble moyennement convaincant, parce qu'inachevé, laissant des initiatives sans lendemain et des idées un peu pendantes, comme ce pénis de LED dont on parlait plus haut.

Acte II

C'est sans conteste le meilleur moment de mise en scène de tout le Ring, non seulement très bien fait, mais qui dit aussi tout du sens général que Valentin Schwarz a voulu donner à son travail. Si tout avait été de ce niveau, l'issue de ce Ring aurait sûrement été différente.
Nous nous retrouvons dans un espace-salon qui ressemble à celui de Rheingold ou de Walküre acte II, et un peu à celui des Gibichungen dans Götterdämmerung. Ces familles n’ont aucune imagination créatrice…

Le décor est donc un autre salon, avec un tableau au mur représentant un père et son fils (on pense de très loin à Vuillard), qui est l'obsession centrale de ce Ring. Andrea Cozzi n'a pas vraiment varié les plaisirs de découverte de nouveaux espaces, le changement dans la continuité et le vague ennui.

À la place de majordomes et femmes de chambre, il y a des gardes malades car à jardin, on devine de dos un lit médicalisé sur lequel veille un jeune homme en tee shirt jaune.
Arrive Alberich avec un maigre bouquet à offrir à ce malade probablement en fin de vie et qu'on ne voit pas, le bouquet est négligé par les servants, et puis arrive Wotan avec un très gros bouquet de fleurs dont on va prendre soin. Les deux ont eu la même idée, rendre visite à cet oncle à héritage : on se croirait presque dans Gianni Schicchi.
Et Valentin Schwarz montre leurs idées parallèles, leur obsession parallèle, leur gémellité travaillée par l'envie et d'une certaine manière aussi leur fraternité Lorsque Siegfried arrive, ils vont s'asseoir devant la cheminée et regarder ensemble le héros avec des gestes empreints d'une certaine complicité.
Il y a des idées justes et amusantes (le bouquet), qui soulignent aussi ce qu’on sait depuis Rheingold, il y a celui qui a réussi et celui qui n’a pas réussi, et de l’autre côté du lit, il y a ce jeune homme qui était l’enfant enlevé de Rheingold, avec le même tee-shirt qui a l'air méditatif et douloureusement atteint.
C'est une scène très bien faite : Fafner en fin de vie, le jeune Hagen (ainsi est-il nommé dans la distribution) à son chevet, les deux autres « pères » contre la cheminée : c'est la ligne des pères, le vrai (Alberich) qui a enlevé Hagen le premier et en a commencé probablement l'éducation, le faux (Wotan) obligé de concevoir Siegfried en substitution, et le beau-père Fafner qui a reçu ce fils (Hagen) en dépôt et en gage dont il n’a pas dû savoir trop quoi faire. Les pieds nickelés en quelque sorte…
Du coup la scène représente ensemble, les pères et les fils, et la défaite des pères face aux fils qui courent vers l'avenir. Tous les enjeux sont là, et tous les personnages en quête, – tous des hommes, qui tous vont rater leur entreprise (même si au bout du bout Alberich restera vivant, mais dans la perspective de ce Ring, c’est sans utilité).
Quand Mime et Siegfried arrivent, Alberich et Wotan s’installent donc face à la cheminée, attendant de voir le héros en action.

L'oiseau est figuré par une garde malade qui sans doute n'en peut plus et va s'asseoir sur le divan, à côté de Siegfried plutôt intéressé (la sève, ah, la sève), la scène de l'oiseau est une scène de séduction qui nous rappelle que Castorf avait fait un Siegfried qui finissait par posséder l'oiseau (sauf que l'oiseau est ici une oiselle sans plumage… mais avec du ramage). Ici on ne sent pas de véritable connotation érotique, juste de timides gestes mais un réel intérêt quand même et les coups de cor de Siegfried (qui porte la béquille-Notung et dont on s'attendrait un usage musical) sont en fait des commentaires musicaux de ses actes maladroits , comme dans un film d’animation (cela rappelle l'utilisation de la musique, cette fois par Wagner, dans l'entrée de Beckmesser à l'acte III de Meistersinger), avec effet comique garanti. On rit dans la salle.
Tout ce bruit finit par réveiller le malade qui cherche à se lever, et qui pousse alors un déambulateur. Le malade qu'on voit enfin, c'est Tonton Fafner, qui n'a gardé de Rheingold que son écharpe (encore les traces). Siegfried aussi sale gosse que les autres va violemment le faire tomber en retirant le déambulateur. L'autre va mourir de crise cardiaque, non sans proférer son monologue monitoire et non sans être achevé par Siegfried qui veut être sûr de son coup, aidé par le jeune Hagen qui se révèle à cette occasion.
On est rassuré, les fils ne valent pas mieux que les pères. Le tonton à héritage mort, le jeune Hagen s'empresse de faire les poches  et glisser un anneau(?) poing américain en diamant dans sa redingote  (l'anneau, le trésor ?), mais l'oiseau indique à Siegfried la redingote et Siegfried désormais propriétaire de tout et y compris du jeune Hagen va s'empresser de le reprendre, mais pour le redonner à Hagen (sans doute parce que l'objet n'a aucune valeur ni magique ni marchande) qui le portera jusqu'au Götterdämmerung. On est bien chez les petits malfrats (et entre parenthèses, la vision de Castorf du Rheingold avait sa cohérence prémonitoire…) tels pères, tels fils.
Pendant ce temps, Mime et Alberich se bagarrent, et Alberich sort, furieux. Tandis que Mime revient vers le devant de la scène pour accomplir ce qu’il a médité depuis des années, tuer Siegfried à la déloyale, seule manière qu’il connaisse. Mime revient donc quand le boulot est fait : Fafner est mort, tout est récupéré, et Siegfried est flanqué du jeune Hagen, qui très vite semble voir en lui un double à suivre. Car si l’anneau et le Tarnhelm se portent assez facilement, là il va falloir s’encombrer du jeune Hagen.

L'Oiseau (Alexandra Steiner), Siegfried (Andreas Schager), Mime (Arnold Bezuyen), le jeune Hagen (Branko Buchberger)

Suit la fameuse scène où Siegfried comprend le vrai sens des (fausses) paroles de Mime, grâce à l'oiseau, là aussi très bien faite : sur le divan l'oiseau, à côté de lui Siegfried, puis Mime revêtu de sa casquette (de Hagen) à l'envers et enfin le jeune Hagen.
Et tout se finit comme il se doit : Siegfried étouffe Mime (avec un coussin du divan), mais ne finit pas le boulot et demande au jeune Hagen, qui désormais lui appartient, de le finir pour lui (comme Wotan avec le garde pour Hunding). Siegfried a bien autre chose à faire… Car vient le moment où averti par l'Oiseau il doit filer vers Brünnhilde, suivi par le jeune Hagen qui a récupéré sa casquette tombée au moment où Mime succombe, et qui semble fraternellement attaché à Siegfried, comme un toutou, un homme de main fidèle, ou peut-être de manière plus ambiguë… (ce qui expliquerait la solitude haineuse d'un Hagen amoureux éconduit au Götterdämmerung)

 

Acte III

L'acte Ill se déroule au départ dans le décor de l'acte II, mais vu de derrière, vu du fond. Wotan effet va y chercher en quelque sorte, celle qui « voit derrière les yeux », Erda, et donc le tableau du père et du fils est vu de dos, la cheminée avec ses braises et ses bois consumés vue de derrière : dans les coulisses du monde en quelque sorte, Wotan trouve Erda, accroupie (un peu comme chez Chéreau), il lui parle, mais ce n'est pas elle qui lui répond
Erda apparaît venant du fond et chante, portant la fameuse pyramide lumineuse (qu'on n'avait pas encore vue dans Siegfried). Autre mystère ?
On se souvient qu'Erda avait quitté la scène lors de Rheingold accompagnée par une jeune fille (que d'aucuns avaient identifiée comme Brünnhilde, car à l'époque, l'imagination échevelée du spectateur était au pouvoir, tout était permis puisqu’on n’avait pas vu la suite). Elle se retrouve là encore dans Siegfried dédoublée. En fait Erda est double et représente des âges de la vie, jeune et âgée (elle est celle qui voit les origines mais aussi le futur), l'Erda qui chantait dans Rheingold a désormais beaucoup vieilli et ne peut plus chanter et à peine se mouvoir, celle qui chante c'est la petite fille de Rheingold qui est
devenue plus grande, elle a l'âge qu'Erda avait dans Rheingold, Erda est une, mais dédoublée, et donc elle vieillit sans vieillir… C'est une coquetterie de mise en scène, à l'utilité douteuse, mais il faut bien composer avec ces Dieux qui n'en sont plus mais qui le sont encore dans une réalité de plus en plus tremblotante, mythique oui et non… Le spectateur est un peu perdu, mais le spectateur est là pour subir.
Wotan va donc affronter Siegfried et son double du moment, Hagen, combat de deux malfrats, le vieux et le jeune, dans la tradition, sauf que Siegfried et Hagen tournent en dérision le Wanderer en le coiffant de la casquette de Mime-Hagen qui traînait encore sur la tête de son légitime propriétaire (ah…ces traces…). Enfin, en menaçant Siegfried de son revolver, le Wanderer en vide au préalable le chargeur, manière de faire peur sans risque à celui qui n'a pas (encore) peur, et de montrer qu'il passe la main car il sait de toute manière que désormais Siegfried est une force qui va : il quitte la place.  Hagen toujours coiffé de sa casquette, (après Rheingold, WalKüre et presque tout Siegfried) une casquette que l’on désespérait de revoir enfin sur le chef de son légitime propriétaire (à quoi rêvent les spectateurs pendant Siegfried…) suit Siegfried encore… Mais plus pour très longtemps.

Siegfried arrive donc devant la Pyramide de Die Walküre où dort Brünnhilde, et des fumées abondantes montrent que quelque chose se passe. Il est toujours suivi de Hagen, mais là le jeune Hagen devient gênant. Or nous avons souligné l'ambiguïté de cet attachement du jeune Hagen envers Siegfried, amoureusement soumis d'une certaine manière.
Vu comme va se développer le futur duo (on va le voir très vite) il est inutile de compliquer les choses dans la mise en scène. Et donc mieux vaut représenter un Siegfried jaloux de sa prérogative de jeune héros sans peur (pour le moment) qui n'a pas besoin de factotum…
Alors Siegfried le repousse violemment, à plusieurs reprises, si bien que le jeune Hagen s'en va seul vers son destin de Hagen qui va se développer au Götterdämmerung tout en jetant sa casquette, geste hautement symbolique : le jeune Hagen à casquette c’est fini. Un autre Hagen commence…
Voilà comment se nourrissent les haines : Valentin Schwarz veut reproduire chez les fils la haine originelle des pères, en puisant dans la jeunesse ou l'enfance les motifs de ces haines familiales profondes ou en créant des situations susceptibles de faire naître la haine, cet amour en négatif…
Ainsi l'impression est que c'est moins l'Or de Siegfried qu'Hagen voudra poursuivre et détruire au Götterdämmerung, que Siegfried lui-même, par amour déçu peut-être, par refus de voir fleurir ce couple Brünnhilde-Siegfried d'où il est exclu. Toute l’histoire réduite à un amour déçu de roman de gare… Harlequin, ouvre-toi.

Siegfried (Andreas Schager), Brünnhilde (Daniela Köhler) et en arrière plan, Grane (Igor Schwab)

Avant même le réveil, Brünnhilde sort de la Pyramide et des fumées, suivie de Grane, qui rappelons-le est un homme dans cette mise en scène.
Grane, c'est le passé auquel Brünnhilde reste attachée, Siegfried, c'est l'avenir qu'elle a réclamé à son père. Tout le duo va être un tiraillement entre Grane et Siegfried : on comprend bien pourquoi il ne fallait pas, en plus y mettre le jeune Hagen, cela serait devenu du Feydeau…
Elle apparaît de blanc vêtue, lunettes noires et bandages, comme les Walkyries de la chevauchée. On pense tout de suite de nouveau à la chirurgie esthétique : une vingtaine d'années c'est long, et il faut se conserver toute belle pour le jeune homme qui va la cueillir. D’où un nécessaire traitement qu’elle n’avait pas subi dans Walküre, au contraire de ses sœurs.
Dans un deuxième moment, parce qu’il y a une pyramide et parce qu’il y a des bandelettes on pense à une momification. Après tout, on flirte avec l'Egypte et la momification est un moyen de conserver le corps pour l'éternité. Brünnhilde sur son rocher avait besoin de lutter contre les effets du temps…
Entre la chirurgie esthétique cohérente avec Die Walküre et le sommeil de la Momie, cohérente avec la Pyramide, on ne choisira pas, laissant le spectateur choisir ce qu'il préfère : mais le metteur en scène, pris au piège de la dramaturgie wagnérienne se devait d'inventer une solution pseudo-réaliste pour une Brünnhilde en renaissance juvénile (alors qu'elle était déjà un peu vieillissante dans Walküre). Il invente cependant une solution qui ressemble à une réparation de bombe atomique avec de la ficelle et du sparadrap, mais bon…
Tout le duo se traîne singulièrement : rappelons que décidément, Valentin Schwarz n'est pas très efficace dans les grands duos, répétitifs et sans grande inventivité avec des mouvements dont on prend l’habitude – je monte les escaliers, je les descends, je parcours un peu de coursive, sans véritables idées de conduite d’acteur, de travail sur les expressions.
Dans ce contexte, le sens du duo n'est pas tant la sève qui déborde de l'un (Siegfried) et la peur de la perte de virginité de l'autre (après tout, ils perdent toute deux leur virginité), mais le tiraillement de Brünnhilde et ses hésitations, ses peurs de franchir les limites, qui vont la faire rompre avec le passé, marquées au sol par un sol minéral (autour de la Pyramide) et un sol de parquet (on a déjà vu ça dans Walküre) qu'elle franchit avec
difficulté, et la volonté de Grane de la retenir face à ce petit malotru de Siegfried qui veut la contraindre (harcèlement ?).
Alors à un moment ce tiraillement est figuré (au sens propre) par une Brünnhilde tirée à hue (à gauche Grane) et à dia (à droite Siegfried) dans une scène qui dépare avec le pseudo-romantisme du moment.
Entre Siegfried et Grane il y a donc des oppositions, qui correspondent à la résistance de Brünnhilde, puis à mesure que Brünnhilde va « faiblir », des réconciliations se profilent. En tout cas des discussions, des tractations. On sait qu'au Götterdämmerung Grane suivra Siegfried dans son voyage sur le Rhin, et donc ce jeu de tractations fait tomber la tension et fait esquisser des sourires, autant être bon copains… On pense à ce que donnerait de cela un dessin animé de Walt Disney avec des animaux humanisés …
Là encore, les idées ne sont pas stupides, mais assez mal fichues, ou volontairement mal gérées. En ce sens, l'humour ravageur de Castorf, avec ses crocodiles, qui montrait tout ce que la musique de ce duo avait de faussement romantique, d'excessif et d'artificiel, est assez voisin on riait beaucoup et certains spectateurs s’énervaient beaucoup. Une musique trop ronflante et excessive pour être honnête (un peu comme le final de Rheingold), et en ce sens Wagner trompe le spectateur prêt à y croire. Mais ici, cela devient comme une dispute entre deux hommes pour la « possession » d’une femme ce qui est encore une manière de réduire le mythe à saga de troisième zone, Castorf au moins avait de la grandeur reptilienne, sans jamais faire un seul contresens sur le texte.
Et comme tout finit par des chansons, le duo se termine sur le chant d’amour (et de mort, ne pas l’oublier, ce duo n’est pas en soi un duo du bonheur fou, où Brünnhilde conquiert sa nouvelle liberté de femme, chapeau, redingote, revolver, Ah, mais !

Daniela Köhler (Brünnhilde enfin elle-même, un peu Minnie de Fanciulla del West)

Il y a quelque chose de tragique dans ce travail : il y a de l’intelligence, il y a des idées, il y a aussi la preuve dans Siegfried que Schwarz est capable d’un travail très serré (deuxième acte), et puis on se perd dans des méandres inutiles, parce que prisonnier de son parti-pris initial de mêler mythe et réalité et de garder sans cesse présente la réalité, il doit se livrer à des contorsions pour garder la ligne, qui devient pointillé, qui se tourne elle-même en ridicule ou met le spectateur à rude épreuve : nous avions parlé du jeu de piste, comment comprendre par exemple Erda et son double entrecroisé jeune-vieille/vieille-jeune ? Des spectateurs qui se demandaient qui était le type à cheveux longs qui suivait Brünnhilde ont découvert en lisant la distribution a posteriori que c’était Grane… Alors, j’avertis les futurs spectateurs du Ring III ou des années prochaines à Bayreuth, Grane est très présent dans Götterdämmerung, surtout dans la scène finale mais pas que…

 

Les aspects musicaux

Nous avons souligné notre difficulté à être convaincu de la direction musicale de Rheingold et de Walküre, et dans Siegfried, les choses vont nettement mieux. Cornelius Meister semble un peu plus libéré, peut-être est-ce dû à ce qu’il n’a pas encore abordé l’œuvre à Stuttgart, et qu’il est plus « neuf » en quelque sorte ? L’orchestre est plus présent, avec des moments ironiques, d’autres particulièrement spectaculaires (chant de la forge, duo final) et surtout, bien moins de contraste entre un orchestre étouffé dans la fosse et des moments très ou trop forts. La ligne est plus cohérente, plus liée à la mise en scène, cela respire beaucoup mieux, avec un orchestre d’ailleurs en grande forme (les appels au cor de Siegfried vraiment remarquables sont interprétés par Carsten Carey Duffin du Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks dont il est le premier cor solo), c’est donc un vrai beau moment d’orchestre que nous avons vécu dans ce Siegfried, plus resserré, plus intense et avec un sens dramatique plus assis, mené jusqu’au bout et pas abandonné en rase campagne aux moments les plus attendus comme dans les épisodes précédents. Cette fois-ci, cela fonctionne et c’est heureux.

Le succès pour la distribution a été au rendez-vous avec des applaudissements presque unanimes et particulièrement chaleureux pour tous.
L’Oiseau, interprété par Alexandra Steiner, avait une rondeur inhabituelle, et des aigus bien projetés sans être dardés, au total une prestation de bonne qualité.

Okka von der Damerau (Erda)

Une fois encore la Erda d’Okka von der Damerau remporte un énorme succès, la voix est bien projetée avec une belle homogénéité et une vraie clarté dans l’expression : on comprend tout et c’est vraiment un beau moment de chant. Peut-être cette voix aujourd’hui étendue et plutôt claire convient-elle mieux à Rheingold qu’à Siegfried, où le chant est plus sombre et plus désespéré, mais c’est une remarque plus personnelle que critique, l’ensemble se tient avec beaucoup de relief.
Olafur Sigurdarson est toujours un Alberich puissant, qui fait bien sonner les mots, mais il a eu un peu tendance à crier, il reste que la qualité du timbre et du phrasé frappent, sans que ce soit un Alberich à aigus puissants.
Très noble Fafner de Wilhelm Schwinghammer, qui réussit son monologue adressé à Siegfried, la voix est chaude, projetée, et l'interprétation épuisée est intelligente et frappe : la scène dans sa violence, sa grandeur et la médiocrité des deux autres (Siegfried et jeune Hagen) est assez dense.

Andreas Schager (Siegfried), Wilhelm Schwinghammer (Fafner)

Arnold Bezuyen est plus remarquable par sa prestation scénique étourdissante dans le premier acte que par un chant un peu forcé, qui manque un peu de couleur (notamment au deuxième acte, où l’on doit sentir le double sens et les cris de déni d’une manière plus convaincante) ; il reste qu’il délivre un Mime qui ne fait pas oublier les Mime qu’on a vu sur cette scène, mais qui convainc plus dans Siegfried que dans Rheingold.

Tomasz Konieczny (Le Wanderer) devant la marionnette de Sieglinde

Tomasz Konieczny est un très grand Wanderer, plus convaincant encore que dans Walküre : on distribue souvent le Wanderer à des voix plus mates, plus fatiguées car le personnage est sur sa fin. Ici, l’énergie est intacte, on le sent libre, débarrassé de Fricka, et vraiment magnifique de présence vocale, avec un beau phrasé, avec une grande clarté dans l’expression, avec beaucoup d’intensité et de couleurs, il prend soin des mots et les cisèle (dans Siegfried, notamment au premier acte, c’est déterminant). L’immense succès remporté est pleinement mérité.

Daniela Köhler (Brünnhilde)

Daniela Köhler en Brünnhilde n’a pas démérité, car elle conduit sa voix de manière très expressive, avec une véritable intensité et beaucoup d’intelligence : le duo de Siegfried est surtout difficile pour les derniers moments où l’un et l’autre doivent darder des aigus ravageurs qui arrivent après 40 minutes de duo. C’est une voix plus lyrique que dramatique, dont la « fragilité » convient très bien aux hésitations de la Brünnhilde qui n’est pas encore ici-bas, mais encore là-haut, l’assise et la largeur ne sont pas cependant suffisantes pour la dernière partie du duo qui confine alors un peu au cri. Cependant, rien de scandaleux, mais une prestation plutôt surprenante et au total flatteuse compte tenu de la qualité intrinsèque du matériel, pas forcément adapté au rôle, bien servi aussi par une salle acoustiquement très favorable (à Bastille, ce serait plus délicat).  Mais voilà, quand une chanteuse est intelligente et sait jouer de ses qualités, elle sait sauter ou contourner les obstacles ou du moins les atténuer.
Et puis Andreas Schager, qui a remporté un succès énorme, dû à son nom, dû à son engagement vocal et scénique. Il chante en chien fou, comme le personnage, et c’est ce qu’on attend. Le chant de la forge est impressionnant par le volume, par la résistance, par l’incroyable largeur vocale.
Mais le revers de la médaille c’est que cet engagement conduit à ne pas économiser ses forces et à une fuite en avant vocale qu’il paie au duo du troisième acte, qu’il ne soutient plus aux moments les plus critiques : plus un aigu ne sort dans les cinq dernières minutes, il marque plus qu’il ne chante, et l’aigu final est complètement savonné.
Ce n’est pas la première fois qu’il équilibre mal ses efforts et qu’il ne se contrôle pas. Le seul chef qui arrive à obtenir de lui nuances et contrôle est Daniel Barenboim que ce soit dans Tristan ou Parsifal. C’est d’autant plus regrettable que c’est un vrai Siegfried, c’est sans doute son meilleur rôle, et qu’il est capable d’aller jusqu’au bout du duo sans perdre son aigu (nous l’avons constaté plusieurs fois). La joie de chanter et de faire sonner la voix peut être mieux contrôlée dans une salle si favorable où un moindre volume donné se constaterait à peine, mais permettrait d’aller jusqu’au bout. C’est un vrai regret.

Au terme de ce Siegfried, très soutenu et flatteur musicalement dans l’ensemble, la mise en scène laisse des perplexités. L’impression qui domine n’est pas la négligence, bien au contraire : il est fort possible que le temps supplémentaire de préparation de ce Ring (2020–2022) ait abouti non à une épure, mais à un trop plein d’idées et de précisions ou des ajouts qui ont nui à la compréhension par leur profusion, par volonté de trop bien faire, de mener le concept jusqu’au bout, sans toujours considérer le spectateur ni le spectacle. Mais ce Siegfried nous a montré que lorsque la scène est menée avec rigueur (acte II), c’est une réussite. C’est hélas très rare sur la distance de ce Ring.

 

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Guy Cherqui
Agrégé de Lettres, inspecteur pédagogique régional honoraire, Guy Cherqui « Le Wanderer » se promène depuis une cinquantaine d’années dans les théâtres et les festivals européens, Bayreuth depuis 1977, Salzbourg depuis 1979. Bouleversé par la production du Ring de Chéreau et Boulez à Bayreuth, vue sept fois, il défend depuis avec ardeur les mises en scènes dramaturgiques qui donnent au spectacle lyrique une plus-value. Fondateur avec David Verdier, Romain Jordan et Ronald Asmar du site Wanderersite.com, Il travaille aussi pour les revues Platea Magazine à Madrid, Opernwelt à Berlin. Il est l’auteur avec David Verdier de l’ouvrage Castorf-Ring-Bayreuth 2013–2017 paru aux éditions La Pommerie qui est la seule analyse parue à ce jour de cette production.

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3 Commentaires

  1. Ce Siegfried était,musicalement et vocalement la meilleure journée de cette tétralogie.La mise en scène était acceptable,sinon compréhensible.Le ton ironique de Guy Cherki,pour la décrire,m’amuse beaucoup.Il s’en faut toutefois de beaucoup pour que j’ai envie de revoir cette production,alors que le Ring de Castorf me fascinait à chaque nouvelle vision.
    Schager ,authentique heldentenor,gagnerait à économiser sa voix qu’il avait totalement perdue à la fin du III.

  2. Notre Wanderer est à la peine. Il faut dire qu'il rame pas mal en essayant de décrypter la pensée du metteur en scène qui rame beaucoup, beaucoup. Je suis arrivé à l'instant au bout du compte rendu du Crépuscule et aussi au bout de la route : Bayreuth, le cher hôtel Goldener Hirsch.…. Bon il reste deux jours pour absorber cette scénographie avant le début du RING!!!! Comment aborder les choses ?
    D'abord je pense qu'il faut faire abstraction 1- de toute référence mythologique, mais le Wanderer le dit très bien ; 2- faire abstraction du texte puisque le propos est finalement différent du texte ; 3- faire abstraction des détails que Wanderer a essayé de préciser avec une qualité d'investigations dignes de Sherlock Holmes, mais j'ai décidé de ne pas apporter mes jumelles. Donc je vais travailler sur les GRANDES LIGNES telles que Wanderer les trace dans son propos. Je pense que la première est celle que Wanderer a décrite dans Rheingold : la génétique. Abordons là sous un angle scientifique : de l'ADN initiale et des fœtus bagarreurs aux fœtus bisounours. (en particulier insérer Siegmund et Sieglinde dans la crèche de Rheingold?? qui est ce petit garçon du crépuscule ? Wanderer le suppose Siegfried Jr.… et si c'était Hagen Jr??? et qui sont ces fœtus jumeaux de la toute fin?). Dans cette histoire la génétique est certainement l'idée dominante… mais n'y a t'il pas d'autres aspects dans le RING ?
    Ce que j'aime bien chez Wanderer c'est qu'il est POSITIF : au moins j'ai envie de voir ce Ring, d'autant que sur le plan musical c'est bien, voire très bien, ce qui était mon impression à la retransmission radio. Bon, j'yous quitte et je r'viens mercredi après deux nuits d'étude. Attention je risque de m'endormir sur mon fauteuil comme Brunhilde sur son rocher.

  3. « Rapport du juge d’instruction JPD au président de la chambre des mises en accusation Wanderer.
    D’après les rapports de police et notre propre enquête il s’avère établi que le jeune Siegfried, enfant illégitime et incestueux du sieur Wotan s’est rendu coupable de plusieurs actes criminels. D’une part il a assassiné sur les conseils d’un certain Valentin S (que la police avait entendu auparavant comme témoin) qui s’est fait passer pour un oiseau, Mr Mime qui l’avait élevé en l’absence du père légitime. Par ailleurs l’instruction a fait suspecter le susdit d’intimidation à l’encontre d’un vieillard mourant, Mr Fafner, qui aurait précipité son décès. Les faits ne peuvent cependant pas être établis avec certitude. Enfin le sieur Wotan, qui est réapparu après sa fuite n’a pu expliquer ses actes précédents et a été soumis à une expertise psychiatrique qui a conclu qu’il était responsable de ses actes. Cependant il a pris la fuite avant son inculpation. Nous recommandons l’inculpation du jeune Siegfried pour meurtre à l’encontre de Mr Mime et du sieur Wotan pour meurtre de son fils Siegmund et faits d’inceste vis-à-vis de sa fille Sieglinde. »

    Concernant la représentation :
    1- Acte 1 : mise en scène nulle
    2- Acte 2 : mise en scène nulle
    3- Acte 3 : mise en scène nulle
    N’en déplaise à Wanderer, même le II… désolé. Cela est déglingué, sans intérêt, sans cohérence. Autant regarder un soap opera américain en version originale sans sous-titre et en ne sachant pas l’anglais !
    J’ai beaucoup aimé la direction, et globalement les chanteurs. J’ai apprécié Daniela Köhler, Tomasz Konieczny me parait un peu uniformément sonore ici, contrairement à Walküre. Mime et Alberic excellents.
    Reste le cas Andreas Schager… il est toujours juste, il a une puissance exceptionnelle, il finit même très bien, sans épuisement, le III. Mais je n’arrive pas à apprécier cette voix toute et uniquement en puissance, avec toujours la même émission, propulsion des notes. C’est une voix plébéienne, j’aimerais lui entendre du raffinement. Même dans les « murmures…. du salon ». Tristan en 2018 et ce Siegfried… bof ! Cependant je ne disais pas cela du Parsifal de 2019. Bon, laissons le temps au temps.

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