Vincenzo Bellini (1801–1835)
I Puritani
Opéra en deux actes (version de Naples 1835)
Livret de Carlo Pepoli d'après le drame historique Têtes rondes et cavaliers  de Jacques-François Ancelot et Joseph Xavier Boniface

Révision Alberto Zedda et Federico Agostinelli – Editions Ricordi

Avec :

Karine Deshayes (Elvira)
Celso Albelo (Lord Arturo Talbot)
René Barbera (Sir Riccardo Forth)
Nicola Ulivieri (Sir Giorgio)
Chiara Amarù (Enrichetta di Francia)
Dmitry Ivanchey (Sir Bruno Roberton)
Kihwan Sim (Lord Gualtiero Walton)

Choeur Opéra national Montpellier Occitanie
Chefs de Choeur : Noëlle Gény, Jacopo Facchini
Choeur de la Radio Lettone
Chef de choeur : Sigvards Klava

Orchestre National Montpellier Occitanie
Direction musicale : Jader Bignamini

15 juillet 2017 au festival de Montpellier

Le festival de Radio-France Occitanie Montpellier s'est depuis longtemps fait, notamment à l'opéra, le lieu des redécouvertes d'oeuvres rares, de versions inconnues d'oeuvres plus fréquentes. On ne vient pas à ce festival sans découvrir des pans de la musique qu'on ne soupçonnait et ce depuis le règne de René Koering. Dans cet esprit, I Puritani, une des oeuvres maîtresses de Bellini, est donnée dans la version de Naples de 1835, écrite pour la Malibran. Et c'est Karine Deshayes qui relève le gant.

La version dite « Malibran » d'I Puritani, remaniée pour Naples l'année même de sa mort par Bellini, n'a jamais été donnée en raison de la terrible épidémie qui frappa la cité de Campanie. Il fallut attendre 1986 pour que cette version en deux actes, étoffée notamment au 1er acte par un trio et par une extension du duo final, baissée pour convenir à la voix de mezzo de la célèbre cantatrice et surtout réécrite pour deux ténors – le rôle de Riccardo n'étant plus tenu par un baryton – voit enfin le jour, avec Katia Ricciarelli et Chris Merritt dans les rôles principaux.

Le Festival Radio France Occitanie Montpellier a eu la bonne idée de confier à Karine Deshayes, brillante Armida rossinienne cette saison à l'Opéra Comédie et bientôt Semiramide à St Etienne, cette Elvira à la tessiture plus centrale, nouveau défi largement relevé par notre championne lyrique française. Malgré quelques ajouts et une orchestration plus travaillée, le livret de Carlo Pepoli, bancal, conserve ses anachronismes et son manque de crédibilité, mais le travail tout en finesse du jeune chef Jader Bignamini, sa direction nerveuse au tempo soutenu et aux couleurs saturées, a permis d'atténuer ces imperfections formelles.

Bride sur le cou jusque que dans les grand moments d'élégie où Bellini demeure l'empereur de la cantilène, l'Orchestre national Montpellier Occitanie ainsi maté n'a pas faibli, offrant le meilleur de lui-même dans un répertoire délicat. A côté de Chiara Amaru respectable Enrichetta, Nicola Ulivieri honorable Giorgio, Dmitry Ivanchey (Bruno) et Kihwan Sim (Gualtiero) impeccables comprimari, la prestation du jeune ténor René Barbera (Riccardo) n'est pas passée inaperçue : timbre mâle, technique rigoureuse, vaillance et extension dans l'aigu le promettent à un brillant avenir. Il incarnera d'ailleurs l'an prochain Il Conte Almaviva à la Bastille. C'est à lui que revenait  naturellement le rôle virtuose et solaire d'Arturo, mais la direction du Festival a préféré inviter l'espagnol Celso Albelo qui venait d'interpréter sans grand succès Il Duca di Mantova dans Rigoletto à Orange. Las, son ténor serré et monocorde s'est bien vite époumoner, faute d'ampleur et de ressources, au lieu de planer en toute liberté sur les hauteurs d'Arturo, écrites rappelons-le pour le fameux Rubini…
Karine Deshayes se situe sans surprise à des années lumières de là. On ne sait qu'admirer le plus de cette technique renversante qui lui permet toutes les audaces (de l'entêtante Polonaise « Son vergin vezzosa », à la flamboyante cabalette « Ah sento o mio bell'angelo » en passant par la suave scène de folie), de ce phrasé sculpté en plein pâte, de cette ligne souple et irisée, ou de cette vélocité à la fois intense et recherchée, car tout dans son interprétation est en place, précis, élégant et caractérisé avec soin. Qui dit mieux ?

 

 

 

Avatar photo
François Lesueur
Après avoir suivi des études de Cinéma et d'Audiovisuel, François Lesueur se dirige vers le milieu musical où il occupe plusieurs postes, dont celui de régisseur-plateau sur différentes productions d'opéra. Il choisit cependant la fonction publique et intègre la Direction des affaires culturelles, où il est successivement en charge des salles de concerts, des théâtres municipaux, des partenariats mis en place dans les musées de la Ville de Paris avant d’intégrer Paris Musées, où il est responsable des privatisations d’espaces.  Sa passion pour le journalisme et l'art lyrique le conduisent en parallèle à écrire très tôt pour de nombreuses revues musicales françaises et étrangères, qui l’amènent à collaborer notamment au mensuel culturel suisse Scènes magazine de 1993 à 2016 et à intégrer la rédaction d’Opéra Magazine en 2015. Il est également critique musical pour le site concertclassic.com depuis 2006. Il s’est associé au wanderesite.com dès son lancement

Autres articles

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire !
S'il vous plaît entrez votre nom ici