La petite renarde rusée (1924)
de Leoš Janáček (1854–1928)
d'après Rudolf Tesnohlidek

Noriko Urata (La renarde Bystrouska).
Caroline Meng (Le Renard/ Le Grillon/ Le Coq).
Laurent Bourdeaux (Le Garde-Chasse/ Un animal de la forêt).
Philippe Cantor (Le Blaireau/ Le Curé/ Harasta le Vagabond).
Sylvia Vadimova (Le Chien Lapak/ Une poule/ L’Aubergiste/ Le Pic-vert/ Un animal de la forêt/ Un renardeau).
Françoise Masset (La femme du garde-chasse/ La Chouette/ Une poule/ Un animal de la forêt/ Un renardeau).
Paul Gaugler (Le Moustique/ L’Instituteur)
Sophie-Nouchka Wermel (Le Crapaud/ Frantik/ Le Geai/ Une poule/ Un animal de la forêt/ Un renardeau).
Joanna Malewski (La Sauterelle/ Pepik/ Une poule huppée/ Un animal de la forêt/ Un renardeau).

Ensemble orchestral TM+
Le jeune chœur de Paris.

Laurent Cuniot (direction musicale)
Louise Moaty (mise en scène)
Adeline Caron et Marie Hervé (scénographie et costumes)
Benoît Labourdette (collaboration et conseil vidéo)

Athénée Théâtre Louis Jouvet, 15 mars 2017

Une vision poétique et émouvante d’un hymne à la nature enchanteur.

Produit par l’ARCAL, compagnie lyrique qui depuis près de vingt-cinq ans effectue dans toute la France un remarquable travail de sensibilisation à l’opéra, et coproduit avec diverses scènes nationales et théâtres, ce spectacle a déjà beaucoup tourné et l’on est heureux qu’il arrive à Paris dans ce délicieux écrin qu’est l’Athénée.

Pour s’adapter à différents lieux dont certains de taille modeste, la version réorchestrée par Jonathan Dove pour seize musiciens a été choisie ; une excellente idée, car son équilibre est parfait et le jeu des timbres instrumentaux s’en trouve renforcé sans que la musique semble souffrir d’anémie ou d’excès de minceur. Il est vrai que la direction vivante et lyrique de Laurent Cuniot fait briller ses couleurs et les membres de l’ensemble orchestral TM+ s’en donnent à cœur joie.

Autre atout : une distribution homogène de solistes triés sur le volet qui forment une équipe soudée, dont le plaisir de jouer et de chanter est visible et communicatif. Quelques-uns s’en détachent, ne serait-ce que par l’ampleur de leur(s) rôle(s), mais tous sont épatants. En tête, le Garde-Chasse bourru mais au grand cœur de Laurent Bourdeaux, le Curé et le Vagabond de Philippe Cantor, qu’on a longtemps connu dans le répertoire baroque, la Femme du garde-chasse de Françoise Masset, dont on aime la drôlerie et la finesse musicale, le Renard entreprenant de Caroline Meng et bien sûr la Bystrouska de Noriko Urata, voix claire, brillante et charnue habilement conduite.

Tous sont d’autant plus remarquables que le spectacle conçu par Louise Moaty leur demande une implication sans réserve. Car il ne s’agit pas, ici, d’une représentation théâtrale classique. Le plateau est utilisé (et celui de l’Athénée est relativement réduit, obligeant les surtitrages à se réfugier sur les côtés) mais aussi un écran à mi hauteur, sur lequel sont projetées des films vidéo réalisée en direct ; les personnages, que l’on voit sur les planches, s’y retrouvent en gros plans, pour des effets amusants qui soulignent leur caractère. Les mondes animal et humain s’y côtoient en images colorées et séduisantes, évoquant les projections de lanternes magiques ou les premiers temps du cinématographe ; et les spectateurs participent à la fête, brandissant des dessins d’yeux d’animaux pendant la scène du mariage de Bystrouska. On pourrait parler de performance, mais le mot serait trop restrictif. Louise Moaty et ses complices ont réussi à donner de la profondeur au conte moral de Janacek – le compositeur a écrit lui-même le livret d’après le roman imagé de Rudolf Tensnohlidek, bande dessinée avant l’heure. Qui plus est, les films réalisés à chaque séance sont téléchargeables après la représentation. Comment mieux proclamer le règne de la fantaisie, et faire de l’opéra un art d’aujourd’hui ?

Michel Parouty
Titulaire d’une licence de lettres modernes, d’un Diplôme d’Etudes Supérieures de Philosophie et de deux certificats de musicologie, Michel Parouty commence sa carrière de journaliste en 1979, tant dans des revues spécialisées que dans la presse quotidienne en France (Opéra International, Diapason, Les Echos) et à l’étranger (La Tribune de Genève, le Record Geijutsu de Tokyo). Parallèlement à son activité dans la presse écrite, il travaille à la télévision (France Supervision, programme 16/9 d’Antenne 2) et à la radio (Radio classique, France Musique). Il collabore aujourd’hui régulièrement au magazine Opéra Magazine et Lionel Esparza l’invite fréquemment dans le Classic Club de France Musique. Il est par ailleurs l’auteur de plusieurs ouvrages dont La Traviata/Vivre avec Violette (Editions 1001 Nuits), Les Temples de l’opéra (avec Thierry Beauvert) et Mozart aimé des Dieux, ces deux derniers publiés dans la collection Gallimard Découvertes.
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